Ce sont des rêves vieux, des légendes anciennes,
Qui s'exhalent soudain de nos tombes guerrières,
Mêlant au vent des pics leurs antiques antiennes,
Et leurs murmures d'air sur les cimes altières.
Ce sont des épopées, des songes assoupis,
Un passé vénéré autant que silencieux,
Qui dorment sous les rocs et demeurent tapis,
Ce sont des âges grands, des souffles audacieux.
Épaules dans le froid et chevelure au vent,
Envoûté par l'aura des volutes brumeuses,
Le voyageur épris de mystère glaçant,
Contemple avec passion les crêtes montagneuses.
L'impétueuse aura telle un voile nordique,
Tamise la clarté les jours de brume étrange,
Et la fièvre venteuse en un souffle magique,
Se plaît à enserrer ses joues d'un rude lange.
Face au paysage transcendant et fugace,
Couvrant les nuages sur ce massif gréseux,
L'horizon s'offre à lui autant qu'il le dépasse,
Le faisant otage de ces lits cotonneux.
La cime rocheuse frémit de rais timides,
Par-delà les nuées surgit le faste éther,
L'abîme se creuse, comme un écrin livide,
Vient çà et là jouer des contrastes austères.
Et le froid le saisit, le sombre voyageur,
De ces aspirations, de ces halos d'antan,
De ce vertige noble, embrassant la hauteur.
Le passé le saisit, d'un tourment exaltant.
Il surplombe l'étang, la mer de brumes pâles,
Et buvant aux sources qu'il embrasse des yeux,
Étreint par l'énigme que le brouillard étale,
Il exhume la force et l'esprit des aïeux.
Il se tient, sur les monts, embrasure des temps,
Au lieu où l'avenir épouse le passé,
Sur les pierres sacrées où l'homme, en son instant,
S'inscrit, gravant son nom dans une éternité.
~ H. Lefort et Alexandre
